Pascale Planche
Professeur de Psychologie du Développement
UBO-Brest, laboratoire : CREAD (EA 3875)
A la suite du rappel du développement langagier de l’enfant qui deviendra bilingue, cette intervention aura pour objectif de montrer l’influence du bilinguisme précoce sur le développement et le fonctionnement cognitif, affectif et social de l’enfant. Le bilinguisme précoce impose la coexistence de deux perceptions et de deux interprétations du monde. Il participe à la construction identitaire de l’enfant en l’inscrivant dans deux cultures, dans deux littératures mais aussi dans son histoire inter-générationnelle.
L’enfant, confronté à l’apprentissage de deux langues depuis sa naissance, saisit très tôt le caractère arbitraire du langage : un même objet peut être désigné par des mots différents dans chaque langue, une même réalité peut être approchée d’une manière différente dans chaque langue. Pour traduire un discours d’une langue dans l’autre, il n’utilise pas « l’équivalent de traduction », il oublie les mots du texte et cherche à rendre compte du sens global dans l’autre langue. Les transferts répétés et rapides d’une langue dans l’autre au cours des échanges quotidiens entraîne une « certaine gymnastique mentale » susceptible de permettre l’installation d’un style de pensée globalisant profitable au fonctionnement cognitif dans son ensemble.
Cependant, le bilinguisme « additif » (les deux langues sont valorisées par l’entourage familial et social) comme le bilinguisme « soustractif » (l’une des deux langues est dévalorisée dans le milieu familial ou (et) social) peuvent être à la source de difficultés pour l’enfant. Les aspects conatifs (affectifs et motivationnels) apparaissent au cœur de toute problématique liée à la transmission et à l’apprentissage des langues dans un contexte plurilingue. Il ne s’agit pas seulement de l’acquisition par imprégnation contextuelle de plusieurs codes linguistiques distincts, l’enfant tient un rôle actif dans cet apprentissage, nous le verrons, il a son mot à dire…